L'ethnomusicologie appliquée, 
pour qui ? pourquoi ? 
par Laurent Aubert, Monique Desroches et Luciana Penna-Diaw



Les champs de l’ethnomusicologie appliquée
La perspective de ce qu’il est convenu d’appeler l’ethnomusicologie appliquée est devenue un courant important de notre discipline. Traduction relativement fidèle de l’anglais 'applied ethnomusicology', ce terme est en train de s’imposer en français pour définir un large éventail de travaux et de pratiques issus de diverses réflexions sur le sens de notre activité. Depuis quelques années, la problématique de l’ethnomusicologie appliquée anime de nombreuses recherches en cours dans des cadres académiques tels que le Centre de recherche en ethnomusicologie (CREM) du CNRS à l’Université de Nanterre, l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) à Paris ou le Laboratoire d’ethnomusicologie et d’organologie (LEO) de l’OICRM à l’Université de Montréal. Mais elle est aussi au cœur des préoccupations d’institutions à vocation non universitaire, comme la Cité de la musique-Philharmonie de Paris avec son département Éducation, l’Université des Arts Codarts de Rotterdam avec sa section World Music, ou encore les Ateliers d’ethnomusicologie de Genève. Chacun de ces organismes est engagé depuis longtemps dans une forme particulière d’ethnomusicologie appliquée, ou du moins dans un type d’action pédagogique ou culturelle pouvant y être assimilé.
En 2007, était également fondé dans le cadre de l’ICTM (International Council for Traditional Music), un groupe d’étude (Study Group) consacré à l’ethnomusicologie appliquée. Ce groupe définissait ainsi cette notion : " L’ethnomusicologie appliquée est l’approche, guidée par des principes de responsabilité sociale, qui étend les buts académiques habituels d’élargir et d’approfondir la connaissance et la compréhension par la recherche de solutions à des problèmes concrets et par un travail qui s’exerce à la fois à l’intérieur et au-delà des contextes typiquement académiques "1. Dans cette optique, l’ethnomusicologie appliquée serait une ethnomusicologie qui se veut " impliquée ", ou plutôt engagée dans une forme ou une autre de valorisation ou de coopération, voire d’action sociale ou politique. Elle peut être tournée vers la conservation d’anciennes formes musicales et de répertoires menacés, vers l’aide à la formation disciplinaire et à la mise en archives, ou encore vers le développement de moyens, de débouchés et de stratégies de communication inédits pour les musiques qu’elle investit et leurs interprètes. Mais avant tout, ces deux qualificatifs, impliquée et engagée, mettent l’accent sur le sujet performant et plus encore, sur la rencontre de sujets – musiciens, danseurs, enseignants, amateurs de musique – autour d’un projet.
Ce travail peut bien sûr passer par la publication d’écrits et de documents, audio, audiovisuels ou multimédia, mais aussi par l’organisation de concerts, de festivals, de "résidences" ou de stages de pratique musicale. Il peut également s’exercer sur le terrain, intégré par exemple à des projets de pédagogie musicale, de développement économique ou de tourisme culturel.
Il est entendu que de telles initiatives soumettent la musique à divers processus de reformatage correspondant à ses nouveaux cadres de production. Quelle qu’en soit la nature, il ne s’agit pas de voiler ces paramètres, mais au contraire de les faire connaître en tant que tels, et même de les revendiquer, en assumant leurs éventuelles conséquences sur le rôle et l’esthétique des pratiques musicales qui y sont soumises.
Des actions relevant de l’ethnomusicologie appliquée peuvent être menées essentiellement selon trois axes :

  • sur le terrain, dans les sociétés d’origine de ces musiques, auquel cas elles supposent un dialogue soutenu avec les divers acteurs et organismes locaux qui leur sont associés ;
  • parmi les populations migrantes, pour autant qu’elles le souhaitent ;
  • et enfin vers le monde exterieur; à travers un travail de transmission, de diffusion et de médiation visant à faire connaître ces musiques hors de leurs frontières culturelles ordinaires.

En ce qui concerne les actions sur le terrain, la première question qui se pose est celle du cadre dans lequel elles devraient être menées. Il est vrai qu’a priori, le contexte institutionnel – essentiellement universitaire et muséal – dans lequel s’exerce habituellement notre activité prédispose mal les professionnels à s’adonner à une forme ou une autre d’action concrète, sinon par la communication des méthodes, des connaissances et des matériaux scientifiques dont ils disposent.

« Préservation », « sauvegarde », « conservation »…
Certaines initiatives ont été menées sur le terrain par des chercheurs, que ce soit individuellement ou dans le cadre d’ONG ou d’associations. Généralement développées sous forme de microprojets réalisés en partenariat direct avec les dépositaires des savoirs et des savoir-faire concernés, elles ont parfois eu des effets positifs. Des exemples existent en de nombreuses régions du monde, qui ont notamment permis la création d’écoles de musique là où la transmission ne s’exerçait plus par les voies ordinaires, la reconstitution d’ensembles musicaux avec les derniers représentants d’une tradition fragilisée ou l’encouragement à la pratique de répertoires délaissés2.
Ces coups de pouce providentiels ont pu contribuer à créer temporairement une dynamique nouvelle et à susciter un regain d’intérêt de la part des jeunes générations ; mais les pressions économiques sont souvent trop fortes et les mutations sociales trop profondes pour que de telles actions aient des chances de susciter des effets durables si elles ne sont pas assorties de débouchés immédiats et, à plus long terme, d’un soutien logistique suivi, voire d’un appui politique, tout particulièrement pour les musiques dont l’acquisition requiert un degré élevé de technicité, et par conséquent une longue période d’apprentissage.
Les ethnomusicologues considèrent généralement que ce genre d’actions de sauvegarde est plutôt du ressort d’organisations internationales à vocation culturelle, à commencer par l’Unesco, avec sa section consacrée au "Patrimoine culturel immatériel de l’humanité". Mais il faut admettre que l’Unesco est dans l’ensemble mal outillée pour résoudre la plupart des problèmes concrets auxquels elle est confrontée ; et ceci pour diverses raisons, liées non seulement à l’immensité de la tâche et aux inévitables lenteurs administratives d’une grosse institution, mais encore à l’extrême diversité des cas, et surtout aux limites de sa marge de manœuvre. Les statuts de l’Unesco stipulent en effet que ses membres sont des États, et qu’en toute circonstance, les États demeurent souverains sur leur territoire. Le rôle de l’Unesco se borne donc à formuler des principes consensuels, et éventuellement à  faire pression pour qu’ils soient appliqués ; mais son pouvoir s’arrête là.
Plus encore, il existe un problème de fond autour de cette notion de patrimoine musical. Des termes tels que "préservation", "sauvegarde", "conservation" reviennent fréquemment dans les déclarations de l’Unesco. Ils se justifient éventuellement dans le domaine de la culture matérielle : une ancienne nécropole, un bas-relief ou une fresque romane mérite en effet d’être sauvegardé. Mais dans le domaine de la musique, le risque est qu’une action de ce type tende à "figer le temps et l’espace de ceux qu’il faudrait sauver", comme le soulignait Steven Feld (1995). La remarque est importante : un corpus musical n’est pas en effet un patrimoine immuable, fixé une fois pour toutes dans le temps et l’espace, mais au contraire un matériau éminemment ductile et malléable, en constante transformation.
Mettre une pratique musicale en patrimoine suppose une construction dont l’objectif transcende la seule volonté d’assurer la présence d’une mémoire dans le futur. Les pratiques musicales se construisent incessamment dans une territorialité et une temporalité non seulement historiques, mais aussi et surtout, culturelles. Les sociétés sont rarement monolithiques et chacun des groupes qui composent la grille d’une société globale propose des parcours patrimoniaux qui visent la reconnaissance et la signature identitaire du groupe. C’est pourquoi les termes "patrimonialisation", "construction identitaire" et "culture" sont si intimement liés. Bon nombre d’associations culturelles dispensent des cours et des ateliers d’initiation à des musiques locales. Le risque est alors grand d’imposer, par ces modes institutionnalisés de transmission, des cadres fixes de référence à une tradition ou encore de normaliser des traits musicaux qui sont par nature mobiles, changeants dans le patrimoine vivant.
Si une pratique musicale vient a disparaître, c’est qu’en l’état, elle ne répond plus aux attentes de la communauté à laquelle elle s’adressait jusque là, qu’elle n’est plus adaptée à aucune situation, et qu’elle a donc perdu sa raison d’être. C’est alors sa mémoire qu’il convient éventuellement de conserver, à travers les traces qui auront pu en être préservées au sein d’archives patrimoniales, publiques ou privées. Vouloir en maintenir les formes seules au nom de la tradition, de l’authenticité ou de l’identité culturelle équivaut à une forme de "sanctuarisation", qui risque de l’exposer à la sclérose, à la congélation et aux manipulations idéologiques de toutes sortes : phénomènes déjà bien connus avec les dérives et les récupérations politiques des mouvements folkloristes des XIXe et XXe siècles.

La mise en spectacle des musiques du monde
Il faut par ailleurs signaler que, depuis une soixantaine d’années, et tout particulièrement depuis les années 1980, nombre de musiques dites "traditionnelles non occidentales" se sont fait une place, certes modeste, mais non négligeable, sur la scène internationale. Quelques institutions spécialisées dédiées à leur diffusion ont vu le jour en Europe. La première, historiquement, a été l’Institut International de Musicologie Comparée (IIMCD), fondé en 1963 à Berlin par Alain Daniélou, mais dissous peu après la réunification de l’Allemagne. D’autres ont suivi, notamment la Maison des Cultures du Monde (MCM) de Paris, instaurée en 1982 par Chérif Khaznadar et Françoise Gründ, ou encore les Ateliers d’ethnomusicologie (ADEM), fondés à Genève en 1983.
Ces trois organismes ont longtemps collaboré, notamment au sein du Extra-European Arts Committee (EEAC), fondé en 1978 et dissous en 1995, qui comprenait également parmi ses membres le Holland Festival et le Tropeninstituut d’Amsterdam, le Commonwealth Institute, puis Cultural Cooperation à Londres, et le Centro Ricerche Teatrali (CRT) de Milan. Le principal but de ce comité était d’organiser conjointement des festivals itinérants et des cycles thématiques de concerts en invitant des artistes et des ensembles de musique et d’arts de la scène jugés représentatifs de leur culture. Les critères appliqués dans la sélection des groupes invités étaient la qualité, l’exportabilité et l’authenticité. Ces trois termes méritent évidemment un regard critique, mais ils correspondaient à un désir sincère de faire connaître les cultures "extra-europeennes" : la qualité car l’intention était bien sûr d’engager les meilleurs artistes possibles ; l’exportabilité car certaines expressions musicales n’ont aucun sens, voire aucun intérêt une fois extraites de leur contexte ordinaire ; quant au critère de l’authenticité, il correspondait à la volonté de présenter des formes musicales respectant les canons de leur tradition culturelle.
On notera que cette notion d’authenticité a été remise en question de façon assez générale dès lors qu’il s’agit de définir une expression artistique. En effet, il est évident que, presque partout dans le monde, les goûts musicaux ont évolué rapidement et que la modernité n’est plus perçue comme une forme d’occidentalisation, voire de corruption ou de contamination d’expressions musicales considérées comme "traditionnelles", mais simplement comme autre chose, comme la manifestation d’une réalité spécifiquement contemporaine. Le patrimoine musical ne relève donc pas uniquement d’un rapport au passé : il s’inscrit aussi fortement dans le créneau de la culture immédiate, celle qui se construit en temps réel, comme nous l’avons signalé précédemment. Les démarches de recherche-création conduites par certains artistes participent à la transformation, voire à la construction de nouveaux patrimoines. On observe là des négociations entre la part collective des musiques, celle que la pratique est censée représenter, et la part singulière d’authenticité issue de la créativité de l’artiste. Et la scènes occupe ici un axe majeur de création de patrimoines. Les recherches autour des espaces scéniques en ethnomusicologie sont encore trop frileuses. Ce regard permet en outre de saisir le rôle du spectateur – souvent non initié aux pratiques présentées – et, en partant de ce constat, de mesurer l’impact de sa faible connaissance du répertoire sur les modalités expressives des pratiques musicales mises en scène.
Par ailleurs, le phénomène de ce que Julien Mallet (2008) a appelé les "jeunes musiques" est devenu mondial, au point de remettre en question la perception que nous avons de la notion même de culture musicale. Aux Antilles françaises, par exemple, la revitalisation et la dynamisation des musiques locales passent en grande partie par les actions des associations culturelles où les jeunes musiciens, danseurs et chanteurs organisent des soirées de danses locales au cours desquelles chacun vient montrer son talent devant le groupe en mettant notamment en avant sa signature singulière, c’est-à-dire son interprétation individuelle de la tradition. Cette rencontre de subjectivités est, pour ces gens, une façon efficace d’assurer une transmission artistique dynamique de la tradition.
Suscitées par les processus de globalisation, les rencontres musicales endogènes et exogènes se multiplient. De nouvelles formes voient le jour, mais souvent sur une très courte période. Le percussionniste sénégalais El Hadji Moustapha Ndiaye donne cette explication à ce phénomène : "Dans le cadre des tambours sabar des Wolof du Sénégal, les jeunes créent des nouveaux rythmes, ils veulent jouer toujours plus vite, ils omettent des frappes et ils empruntent aussi à d’autres traditions. Peu à peu, le rythme n’est plus le même et il y en a un nouveau qui fait surface… malheureusement, cela ne dure pas longtemps !" Ces créations peuvent ainsi être éphémères et il est très difficile pour l’ethnomusicologue de mesurer leur degré d’intégration dans le répertoire d’une tradition musicale.

Les nouveaux cadres de transmission
En ce qui concerne le travail de transmission et de pédagogie, l’ethnomusicologue qui œuvre dans ce domaine se retrouve souvent engagé dans des processus complexes, dont l’application peut contribuer à renforcer les clichés et à banaliser la culture musicale choisie. Le souci de transmettre hors contexte pose de nombreuses questions et implique certaines limites. Quelles musiques transmettre ? Sur quels instruments ? Quels répertoires ? Quel discours adopter ? Pour quel type de public ?… Des précautions sont à prendre et à ce niveau, l’ethnomusicologue doit effectuer un travail auprès des dépositaires du savoir musical qui se posent en garants de l’intégrité des contenus à enseigner. Transmettre une musique traditionnelle implique pour l’ethnomusicologue une forme de terrain moins académique, où de nouveaux axes d’analyses s’appliquent et des pratiques cohabitent.
L’enseignement hors contexte des musiques "du monde" n’est évidemment pas l’apanage des ethnomusicologues, loin s’en faut. Issus de la culture d’origine de ces musiques ou non, les pédagogues concernés se doivent d’être avant tout des musiciens avertis, qui sachent transmettre une pratique musicale à des personnes vivant dans un environnement social qui ne les y prédispose pas. Qu’elle se développe dans un cadre institutionnel ou non, cette activité nécessite l’application de méthodes et de stratégies spécifiques qui tiennent compte des facteurs psychologiques, sociaux et temporels de l'environnement dans lequel elle s’exerce.
Conscient des nombreuses questions posées par ce défi, un groupe d’enseignants en musiques du monde a fondé en 1992 un réseau international sous le nom de "Teaching World Music" (Schippers 1992 ; Lieth-Phillip & Gutzwiller 1995). Rebaptisé "Cultural Diversity in Music Education" (CDIME) en 1997 (Campbell & Schippers 2005), ce collectif organise régulièrement des symposiums destinés à développer une réflexion commune sur les interrogations suscitées par cette démarche proprement transculturelle, qui tend à se développer de plus en plus largement au fil de années 4.

Ethnomusicologie et dialogue des cultures
De manière générale, le récent développement des travaux en ethnomusicologie appliquée est probablement lié au désir de répondre à la simple question "à quoi donc l’ethnomusicologie peut-elle bien servir ?…". En effet, si la recherche dans le champ des sciences «dures» est majoritairement tournée vers les applications sur lesquelles elle débouche, il est certainement utile, voire important de développer une pratique de l’ethnomusicologie qui tienne compte des enjeux auxquels elle est confrontée. Et ceux-ci dépassent de loin le simple cadre académique; sans entrer dans le détail, on peut affirmer qu’ils se manifestent dans des domaines aussi variés que l’esthétique, l’éthique, l’économie, la politique, l’écologie, la spiritualité...
Dans cette foulée, on ne peut ignorer le fait que la notion même de "dialogue" – au sens de Clifford et Marcus (1986) – a changé. Ce dernier va désormais bien au-delà de la seule relation chercheur/informateur (informant en anglais) pour atteindre une chaîne d’intervenants qui inclut les techniciens de studio, les producteurs de spectacles, pédagogues, animateurs et activistes culturels, acteurs associatifs et politiques. De ce fait, c’est aussi la notion d’autorité qui est questionnée. Quelles paroles du terrain privilegier dans la mise en place des projets ? Celle des musiciens locaux, celle des responsables politiques, celle des techniciens, des pédagogues ? S’installe-t-il enfin, et même malgré les partenaires concernés, une certaine hiérarchie dans l’élaboration et la reconnaissance des discours autour des projets d’ethnomusicologie appliquée ?
L’ethnomusicologie est ainsi aujourd’hui amené à considérer tous les paramètres de la musique en tant que fait humain, tous ses aspects. Pour faire face aux défis du XXIe siècle, les ethnomusicologues ne devraient pas seulement investir de nouveaux territoires et développer des axes de recherche inédits ; il leur faut aussi de toute urgence repenser le rôle de leur discipline dans la société, prendre position et explorer de nouvelles perspectives et de nouvelles stratégies de communication, faute de quoi il est probable que l’ethnomusicologie ne parviendra pas longtemps à justifier sa place au sein du monde académique.
Le champ d’activité de l’ethnomusicologue a progressivement changé. Alors qu’auparavant, son univers d’engagement et d’action concernait quasi exclusivement la recherche sur le terrain, dans ces dernieres décennies, il a dû élargir ses domaines d’exploration en s’adaptant notamment aux processus socio-économiques. Il est donc devenu un "poly-ethnomusicologue". Les profils des ethnomusicologues se diversifient ; en plus d’un doctorat et d’une expérience de terrain, ils peuvent aussi être diffuseurs de concerts, conservateurs, pédagogues, musiciens… Plus ils ont des compétences et plus ils correspondent au marché actuel de l’emploi et à une profession toujours en mouvement et de plus en plus interdisciplinaire. Trop peu abordé, le thème de l’ethnomusicologie appliquée se doit d’être questionné et discuté au sein de la communauté scientifique. Si pour certains, ce terme semble faire consensus, pour d’autres, il mérite d’être repensé, ou peut-être renommé, afin de mieux désigner et caractériser cette discipline active et "multidimensionnelle". Couvre-t-il, par ailleurs, les nombreux champs d’action et d’échange auxquels il invite ? L’ethnomusicologie se définit, en effet, d’abord comme une science, et donc comme une "parole sur…", développée généralement dans un cadre académique. Les actions "pour"  les musiques du monde relèvent-elles alors encore de l’ethnomusicologie ?

(Mise en ligne: juin 2018)

 


1. " Applied ethnomusicology " is the approach guided by principles of social responsibility. Which extends the usual academic goals of broadening and deepening knowledge and understanding toward solving concrete problems and toward working both inside and beyond typical academic contexts ≫ (Svanibor Pettan, responsable scientifique du colloque " Historical and Emerging Approaches to Applied Ethnomusicology ", Ljubljana, 8-13 juillet 2008), http://www.ictmusic.org/group/applied-ethnomusicology, consulté le 12.03.2016.

2. Parmi les nombreuses actions de ce type, on peut par exemple signaler la fondation, en 1989, du Centre de formation et de promotion musicale (CFPM) de Niamey (Niger)  ou celle, en 1975, du Natana Kairali, ≪ Research, Training and Performing Centre for Traditional Arts ≫, à Irinjalakkuda (Kerala, Inde). Tous deux ont été créés dans l’intention de réhabiliter d’anciennes traditions musicales et artistiques, ainsi que de développer de nouveaux débouchés pour leurs actuels dépositaires.

3.
Fils du griot Doudou Ndiaye Rose, percussionniste wolof (Sénégal) spécialiste de l’ensemble des tambours sabar.

4. Depuis la conference initiale organisée à Amsterdam en 1992, des réunions ont ensuite été organisées à Bâle (1993), Rotterdam (1995), Dartington (1997), puis notamment à Brisbane (2005), Seattle (2008), Singapour (2012) et Helsinki (2015) ; les deux prochaines sont prévues à Kathmandou en 2017 et à Chypre en 2019 (informations aimablement fournies par Huib Schippers et Trevor Wiggins, membres fondateurs).

 

Références

CAMPBELL Patricia Shehan & Huib SCHIPPERS eds
2005 Cultural Diversity in Music Education : Directions and Challenges vor the 21st Century. Brisbane : Australian Academic Press.

CLIFFORD James et George E. MARCUS
1986 Writing Culture. The Poetics and Politics of Ethnography. Berkeley : University of California Press.

FELD Steven
1995 ≪ From Schizophonia to schismogenesis : The discourse and pratice of world music and world beat ≫, in George Marcus & Fred R. Myers, eds : The Traffic in Culture. Refiguring Art and Anthropology. Berkeley : University of California Press : 96-126.

LIETH-PHILIP Margot et Andreas GUTZWILLER eds
1995 Teaching Musics of the World. Affalterbach : Philipp Verlag.

MALLET Julien
2008 ≪ “Asio Elany !” Le tsapiky, une “jeune musique” qui fait danser les ancêres. Cahiers d’ethnomusicologie 21 : ≪ Performance(s) ≫ : 155-174.

NORA Pierre
1984 ≪ Entre mémoire et histoire ≫, in Les Lieux de mémoire , tome 1, La République. Paris : Gallimard.

SCHIPPERS Huib ed
1992 Teaching World Music : education in non-Western music in the West. Utrecht : VKV.

UNESCO
2004 ≪ Avant-projet de convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel ≫,
Internationale de l’Imaginaire 17, ≪ Le patrimoine culturel immatériel ; les enjeux, les problématiques et les pratiques ≫. Arles : Babel.

 

Article publié avec l'aimable autorisation des auteurs.
Tous droits réservés © Laurent Aubert, Monique Desroches, Luciana Penna-Diaw - Cahiers d'ethnomusicologie - SFE./ Colophon - 2018